Libellés

dimanche 30 avril 2023

Les concertos pour pianoforte et orchestre de Mozart. Généralités.

Mozart en 1777, date de composition de son concerto n° 9. Portrait par un peintre inconnu.

Wolfgang Mozart (1756-1791) a écrit 27 concertos pour clavier et orchestre si l’on compte les quatre adaptations pour clavier et orchestre de sonates françaises de Hermann Friedrich Raupach, de Leonzi Honnauer, de Johann Schobert, de Johann Gottfried Eckard (K 37, 39, 40 et 41) composées entre avril et juillet 1767 (1). Ce corpus est exceptionnel tant en qualité qu’en quantité et au même titre que l’opéra, constitue la contribution la plus significative et la plus originale du salzbourgeois à l’histoire de la musique. Comparable en valeur musicale à celle de Mozart et encore plus abondante en nombre, on ne peut passer sous silence la production de Carl Philip Emanuel Bach (1733-1788) dans le même genre musical, notamment les six concertos Wq 43 composés en 1772 et que le salzbourgeois a pu connaître (2). L’influence de Johann Christian Bach (1735-1782), un compositeur que Mozart n’a jamais cessé d’admirer et dont il fut l’élève, auteur de plusieurs séries de concertos pour le clavecin ou le pianoforte dont les six de l’opus 7 (1770) et de l’opus 13 (1775), est évidente au plan stylistique.


Johann Christian Bach, portrait par Thomas Gainsborough vers 1776. National Portrait Gallery.

En fait le premier concerto de la main de Mozart est le n° 5 en ré majeur K 175 (1774) d’une belle tenue artistique. Moins originaux sont les n° 6 en si bémol majeur, K 238, le n° 7 en fa majeur pour trois pianos K 242, le concerto n° 8 en do majeur K 246, tous trois datant de 1776 (3). Le n° 9 en mi bémol majeur, K 271, dit Jeunehomme (1777), est beaucoup plus ambitieux que les précédents, de même que le n° 10 dans la même tonalité pour deux pianoforte, K 365 (1779). Avec le concerto n° 11 en fa majeur K 413 (1782) débute la glorieuse série des seize concertos de maturité qui prendra fin avec le vingt septième en si bémol majeur (1791) (4).


La composition des grands concertos de maturité coïncide avec l’installation de Mozart à Vienne en mars  1781. A partir de ce moment, Mozart est à son compte et pour financer l’exécution de ses concertos, il organise des académies par souscription. Ces académies remportent au départ un grand succès qui stimule le salzbourgeois et l’encourage à composer des oeuvres de plus en plus élaborées. Les concertos n° 24 en do mineur (K 491) et n° 25 en do majeur (K 502), tous deux datant de l’année 1786,  constituent le point culminant de cette évolution. Par leurs vastes dimensions et leur densité musicale, ils sortent du cadre fixé initialement et  pour ces raisons, il est possible qu’ils rebutèrent le public. Ce dernier n’étant plus au rendez-vous, Mozart fut contraint de stopper les concerts par souscription. Il composera pour des occasions ponctuelles deux autres concertos, le concerto en ré majeur K 537, vingt sixième de la série et  le 27 en si bémol majeur K 595.


Mozart en 1789 par Doris Stock. Portrait contemporain du concerto n° 26 en ré majeur.

La forme du premier mouvement des concertos de Mozart n’est pas sans rappeler celle de l’aria da capo. On peut la résumer ainsi: A A’ B A’’. Dans la partie A qui appartient à l’orchestre, l’essentiel du matériel thématique est présenté et cette partie se termine par une ritournelle et une formule conclusive. Le soliste intervient alors dans une partie A’ dans laquelle il reprend le matériel thématique de A en y ajoutant de nouveaux thèmes et des ornements. La ritournelle finale aboutit à une partie B. Cette dernière relativement modeste dans les concertos de jeunesse et les premiers de la période de maturité, devient plus importante dans les derniers pour devenir un véritable développement thématique dans les concertos n° 25 et 27. La partie A’’ a valeur de réexposition si on se place dans le cadre de la structure sonate traditionnelle mais peut aussi être considérée comme une nouvelle variation de la partie A si l’on s’en tient à la forme aria da capo. Elle aboutit à une répétition de la ritournelle qui, elle même, conduit après un point d’orgue à une cadence confiée au pianoforte qui donne au soliste une occasion pour montrer sa virtuosité. A noter que ce schéma est immuable à l’exception du concerto K 271 dit Jeunehomme où le soliste coupe hardiment la parole à l’orchestre dès la première phrase énoncée par ce dernier, une insolence qui n’est pas sans rappeler celles que le salzbourgeois lancera plus tard à la figure du prince-archevêque Hieronymus von Colloredo (1732-1812).


Le deuxième mouvement peut revêtir des structures variées; parfois il adopte une forme tripartite ABA’ que d’aucuns qualifient de romance. Dans la partie B s’épanouit généralement le cantabile mozartien (K 537) mais quelquefois cette section peut contraster violemment avec la partie A comme dans l’andante du vingtième concerto en ré mineur K 466. Dans certains cas, la forme ternaire est appelée aria car son agencement rappelle celui d’un air d’opéra. Une autre option est celle d’une structure sonate sans développement, solution choisie dans l’andante du concerto n° 25 en do majeur.. A plusieurs reprises Mozart a préféré la forme du thème suivi de variations. Les plus beaux exemples se trouvent dans l’andante varié en sol mineur du concerto en si bémol K 456 ainsi que dans le pathétique andante en do mineur du concerto en mi bémol majeur K 482. Dans de rares cas (mouvements lents du concerto n° 17 en sol majeur K 453 et n° 21 en do majeur K 467), la musique ne se coule dans aucun moule et jaillit spontanément comme le chant d’un bel oiseau libre.


La forme Rondo domine de loin dans le troisième mouvement. Le rondo consiste en l’alternance d’un refrain invariant et de couplets. Cette structure au départ très simple voire naïve dans les oeuvres de jeunesse de Mozart où les couplets sont tous différents et très courts, évolue progressivement dans les concertos avec un souci constant d’unité. Les thèmes des couplets sont de plus en plus travaillés tandis que le couplet central prend la forme d’un développement dans lequel apparaît souvent le thème du refrain plus ou moins élaboré. On aboutit à un compromis entre la structure sonate et la structure rondo, appelé justement rondo-sonate. Les meilleurs exemples se trouvent dans les finales des dix neuvième (K 459) et vingt septième (K 595) concertos.  Cette forme du rondo-sonate va être appelée à un développement considérable pendant tout le dix neuvième siècle. La plupart des concertos romantiques se terminent par un rondo à commencer par celui qui clôt le cinquième concerto en mi bémol majeur, l’Empereur de Ludwig van Beethoven (1770-1827) opus 73 ou le monumental concerto en ré mineur opus 15 de Johannes Brahms (1833-1897). A deux reprises, Mozart a préféré terminer ses concertos pour pianoforte par un thème varié. C’est le cas du finale allegretto du  dix-septième concerto en sol majeur K 453 et du splendide allegretto final du concerto n° 24 en do mineur K 491.


Portrait posthume de Mozart peint en 1819 par Barbara Kraft à la demande de Joseph Sonnleithner

A partir du concerto n° 6 en si bémol K 238, le pianoforte est le type de clavier désigné par Mozart. Le terme de Cembalo (clavecin) n’est utilisé que dans le n° 5 K 175 et disparaît complètement du vocabulaire à partir du n° 12 K 414, à la différence de Joseph Haydn (1732-1809) qui continue de mentionner le clavecin dans ses oeuvres les plus modernes et les plus romantiques comme les sublimes trios avec clavier de 1788-90. Le pianoforte a une partie de soliste et en principe n’intervient pas dans la basse continue mais la découverte de parties séparées de pianoforte doublant la basse de l’orchestre suggère l’utilisation du pianoforte pour renforcer la basse ou colorer l’orchestre dans les tuttis orchestraux..


L’ornementation est une composante obligée dans l’interprétation des concertos mozartiens. Dans son souci constant de précision, Mozart écrit les ornements de sa musique mais il arrive qu’il laisse des blancs quand il estime qu’il est préférable de faire confiance à l’inspiration de l’exécutant. Les exemples les plus significatifs relevés déjà par C.M. Girdlestone se trouvent dans les mouvements lents des concertos K 488, 491 et 537 (5). 


Dans les deux prochains articles, nous étudierons quelques concertos en choisissant les plus significatifs et novateurs.


  1. Théodore de Wizewa et Georges de Saint Foix, Wolfgang Amédée Mozart. I. L’enfant prodige, Desclée de Brouwer, Paris, 1936, pp. 187-197.
  2. Michel Rusquet, Les oeuvres concertantes de Carl Philipp Emanuel Bach, https://www.musicologie.org/15/rusquet_bach_cpe_concert.html
  3. Georges de Saint Foix et Théodore de Wizewa, Wolfgang Amédée Mozart. II Le jeune maître. Desclée de Brouwer, Paris, 1936.
  4. https://fr.wikipedia.org/wiki/Concertos_pour_piano_de_Mozart
  5. C.M. Girdlestone, Mozart et ses concertos pour piano. Desclée de Brouwer, Paris 1953, pp 392-3. 
  6. Les illustrations libres de droits proviennent de l'article. https://fr.wikipedia.org/wiki/Concertos_pour_piano_de_Mozart

samedi 22 avril 2023

Médée par Marc-Antoine Charpentier

Sarah Bernhardt en Médée sur une affiche de théâtre d'Alfons Mucha (1892)


Chronique de la version de concert donnée le 27 mars 2023 par Hervé Niquet et Le Concert Spirituel au Théâtre des Champs Elysées en coproduction avec le Centre de musique baroque de Versailles


Jason est un ingrat, Jason est un parjure!

Médée, est une tragédie lyrique composée par Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) et créée le 4 décembre 1693 à l'Académie Royale de Musique. Le livret de Thomas Corneille (1625-1709) date de la même année. Charpentier caressait depuis longtemps l'espoir de faire représenter une tragédie lyrique mais ce projet était entravé par Jean-Baptiste Lully (1632-1687) qui considérait ce genre musical comme son pré carré. La représentation de la tragédie biblique David et Jonathas (1688) au collège des Jésuites Louis le Grand avait montré les dons exceptionnels de Charpentier dans le domaine lyrique (1,2). Après la mort de Lully, la voie étant devenue libre, Charpentier entreprit avec enthousiasme de mettre en musique le livret de la Médée de Thomas Corneille adapté de la tragédie mythologique de son frère ainé Pierre Corneille (1606-1684).

Malgré l'excellence des interprètes et la collaboration de l'ornemaniste Jean Bérain (1640-1711) et bien que cette œuvre au plan formel se coulât parfaitement dans le moule de la tragédie lyrique lullienne, elle fut accueillie fraichement et retirée définitivement de l'affiche après neuf ou dix représentations. Trop de notes mon cher Charpentier auraient pu dire les critiques de l'époque! Il est vrai que cette œuvre est d'une densité musicale exceptionnelle propre à rebuter un public habitué à la musique plus aérée de Lully. En outre, le reproche d'italianisme souvent invoqué dans le cas de Charpentier par les lullistes, ne tient pas car l'influence des madrigalistes italiens ou de Giacomo Carissimi (1605-1674) s'applique aussi bien à Lully qu'à Charpentier. En fait il s'avère que Médée est un modèle de style français le plus pur. Cet opéra a fait l'objet de deux chroniques (3,4) par deux confrères.

Comme le dit Benoît Dratwicki dans le programme du concert, c'est justement ce qui rebuta le public de l'époque qui nous enchante aujourd'hui. L'oreille actuelle est sans doute mieux éduquée pour apprécier la musique de Charpentier. Cette dernière est plus épicée que celle de la plupart de ses contemporains. A partir de l'acte III, les harmonies se font plus subtiles, le langage musical plus complexe et les dissonances nombreuses. Les audaces harmoniques ne sont jamais gratuites mais toujours au service de l'expression dramatique. Comme l'oeuvre regorge de passages remarquables, il n'est pas possible de les citer tous ici malheureusement.


Jason et Médée. Sarcophage romain de la fin du 1er siècle. Palazzo Altemps, Rome

Le prologue est un panégyrique à la gloire de Louis XIV. Tandis que ce dernier était assimilé au roi David dans David et Jonathas, la louange est plus directe ici et vise toujours à montrer à ceux qui pourraient l'oublier que la légitimité du monarque est d'ordre divin car à l'instar de David, Louis est aussi oint du Seigneur par le Sacre à Reims. La grande passacaille de la fin de l'acte II qui associe l'orchestre, les solistes et un choeur féminin, est un épisode du plus bel effet d'autant plus que quelques variations sont chantées en italien, apportant une touche de légèreté bienvenue. Pendant les deux premiers actes, on assiste à la lente et terrible transformation qui s'exerce chez Médée. Sa jalousie se mue petit à petit en haine. Cette dernière explose à l'acte III. Ce dernier est sans doute l'acmé de l'opéra. Il débute par un air extraordinaire de Médée d'une formidable intensité, Quel prix de mon amour ? Quel fruit de mes forfaits! Ré mineur, d'ordinaire tonalité grave et dévote, selon le traité (Règles de composition, Paris 1690), de M.-A. Charpentier (5), irradie ici le feu d'une rage contenue. Suit un sinistre prélude instrumental en sol mineur (scène V) et la terrible invocation de Médée aux forces de l'Enfer, Noires filles du Styx, divinités terribles.... Quittez vos affreuses prisons. La Vengeance, la Jalousie et un Démon répondent à l'appel d'une voix caverneuse, L'Enfer obéit à ta voix. Commande, commande...Tout serait également à citer dans les actes IV et V. Contrairement à beaucoup d'opéras contemporains ou postérieurs, le climax d'intensité expressive se trouve à l'avant dernière scène avec le duo sublime de Jason et Creuse, Hélas! Prêts d'être unis par les plus douces chaines... C'est bouleversant et on en a les larmes aux yeux. C'en est fait. J'expire, je meurs murmure Créuse. Mais le dernier mot appartient à Médée, Adieu Jason, j'ai rempli ma vengeance...


Dans un souci constant d'approche historiquement informée, Hervé Niquet, l'orchestre et le choeur Le Concert Spirituel se sont attachés à interpréter l'oeuvre en se conformant aussi étroitement que possible aux conditions d'exécution présentes lors de la création de l'opéra. Les préoccupations concernent aussi bien les types d'instruments, leur nombre et leur position au sein de l'orchestre. Vu du public l'orchestre se divise en deux. A droite et au premier plan se trouve un petit orchestre accompagnant le récitatif parlé et plusieurs airs. Il est composé de deux violons, du clavecin, de deux théorbes et plusieurs basses d'archet dont des basses de violon et des basses de viole. Ces dernières ont un rôle spécifique souligné par Jean Duron dans son article intitulé L'orchestre de M.-A. Charpentier (6). Ce petit orchestre correspond grosso modo à un continuo classique renforcé et coloré par quelques instruments d'appoint comme par exemple la flûte basse. Grâce à ce dispositif, les scènes intimistes ressortent plus nettement. A gauche et au centre se trouve le tutti, un orchestre très fourni comportant, placés au premier rang, quatre bassons et quatre hautbois, les flûtes, les flûtes allemandes, les basses de violon. Au second plan sont positionnés les premiers et seconds dessus de violons et les altos (hautes-contre, tailles, et quintes de violons). Cette disposition tout à fait inhabituelle permet de réaliser des effets d'une grande puissance dans les scènes démoniaques. Les hautbois et les bassons utilisés massivement dans le registre grave de leur tessiture donnent à ces scènes une sonorité caverneuse très impressionnante. La trompette naturelle et les timbales apportaient un éclat triomphal au prologue. Il était regrettable que les noms des instrumentistes ne fussent pas communiquées dans le programme de salle.


Médée à gauche avec deux Péliades. Copie d'un relief 420 av. J.-C. Collection des antiquités. Berlin

Cette œuvre d'une immense valeur était servie par une pléiade d'artistes lyriques. Commençons par une remarque d'ordre général. La diction de tous les chanteurs était optimale. Quel bonheur de comprendre à la perfection cette déclamation française du beau texte de Thomas Corneille lors des récitatifs chantés. La compréhension du texte est capitale dans la musique française en général et dans celle de Médée en particulier où la règle, une note de musique par syllabe, est le plus souvent respectée.

Hervé Niquet connait bien cette partition. Il en avait donné une version mémorable au début du siècle avec Stéphanie D'Oustrac dans le rôle titre. C'est Véronique Gens qui endossait ce soir le costume de Médée. Drapée dans une longue robe noire et arborant un port altier,, elle ouvrait de façon saisissante l'acte I avec le bel alexandrin: Jason est un ingrat, Jason est un parjure. Avec un art consommé de la progression dramatique, elle faisait croître la tension au fur et à mesure que les preuves de l'infidélité de Jason s'accumulent jusqu'à l'explosion au début de l'acte III et l'air Quel prix de mon amour...qu'elle chante divinement. Sa voix pleine d'énergie contenue, a un grain fin et rayonne avec puissance dans la vaste salle du théâtre. Avec ce rôle à la mesure de son immense talent de tragédienne, elle livrait la plus belle interprétation de Médée qu'on pût rêver. Cyrille Dubois incarnait un Jason de belle prestance et doté d'une voix superbe. Le personnage n'est pas le plus sympathique des héros mythologiques du fait de sa duplicité et apparaît en outre comme le serviteur des intérêts du roi Créon et de sa fille Créuse. D'une voix claire et virile, Cyrille Dubois donne à son personnage un surcroît de crédibilité en montrant un visage d'amoureux sincère dans les duos avec la princesse. La Créuse de Judith van Wanroij était très convaincante. Pas très sympathique au demeurant, la princesse devient une victime collatérale des machinations de son père. La cantatrice possède une technique vocale fabuleuse et une culture baroque approfondie. Elle formait avec Cyrille Dubois un couple magnifique notamment dans le déchirant duo final Hélas! Prêts d'être unis par les plus douces chaines.

Thomas Dolié, basse, un pilier de l'opéra baroque français, était un Créon impressionnant de puissance vocale et d'autorité jusqu'à l'abus de pouvoir lorsqu'il bannit Médée et la sépare de ses enfants. David Witzak (Oronte), baryton à la voix bien projetée, avait une carrure de roi dominateur parfois adoucie par l'amour qu'il nourrit pour Créuse. Hélène Carpentier soprano faisait entendre avec conviction sa très belle voix dans le rôle de la Victoire et surtout dans celui de Nérine, confidente de Médée. Floriane Hasler, mezzo-soprano prenait part avec énergie et une voix bien projetée avec de beaux graves dans le prologue en tant que Bellone, déesse de la guerre. Adrien Fournaison, baryton, David Tricou, haute contre et Fabien Hyon, ténor, intervenaient dans les rôles de La Vengeance, un démon et La Jalousie respectivement. Ces trois chanteurs arboraient de très belles voix et faisaient montre d'un bel engagement dans les scènes infernales de l'acte III. Jehanne Amzal chantait de multiples rôles et attirait l'attention par sa belle participation dans la Passacaille de l'acte II dans le rôle d'une Italienne. Marine Lafdal-Franc, une habituée de ce répertoire, charmait par son timbre de voix brillant. Sa prestation musicale et dramatique était de grande qualité dans tous les nombreux rôles qu'elle endossait et notamment dans celui de La Victoire.

Placés au fond de la scène, le choeur Le Concert Spirituel avait un rôle primordial. Très actif et dominateur dans le prologue, il intervenait aussi lors des cinq actes de façon bien plus nuancée, avec charme dans Son gusti e dolori le spine son fiori...(chaconne de l'acte II) et de manière très expressive dans le douloureux choeur des Corinthiens à l'acte V, Ah! Funeste revers! Fortune impitoyable. Hervé Niquet dirige avec précision et rigueur solistes, choristes et instrumentistes. Il insuffle son enthousiasme et sa passion à la musique divine de Charpentier et conduit cette dernière à l'incandescence.

Médée. Peinture murale romaine 70-99. Galerie Nationale de Capodimonte (Naples).


Médée est un chef-d'oeuvre absolu et cette exécution fera date dans l'histoire de l'interprétation de cet opéra. On espère que l'enregistrement annoncé captera intacte la magie de cette soirée du 27 mars.


De g à d, Marine Lafdal-Franc, Hélène Carpentier, Floriane Hasler, Jehane Amzal, Judith Van Wanroij, Véronique Gens, Hervé Niquet



  1. https://www.baroquiades.com/articles/recording/1/david-et-jonathas-charpentier-christie-hm

  2. https://www.baroquiades.com/articles/chronic/1/david-et-jonathas-charpentier-jarry-versailles-2022

  3. https://www.baroquiades.com/articles/chronic/1/medee-charpentier-alarcon-geneve-2019

  4. https://www.baroquiades.com/articles/chronic/1/medee-charpentier-versailles-2017

  5. Theodora Psychoyou, Les règles de composition de Monsieur Charpentier. Statut des sources, 2007. https://www.academia.edu/8109352/Les_R%C3%A8gles_de_composition_par_M_r_Charpentier_statut_des_sources

  6. Jean Duron. L'orchestre de Marc-Antoine Charpentier. Revue de Musicologie, 72, 23-65, 1986.

  7. Photos libres de droit trouvées sur wikipedia que nous remercions. https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9d%C3%A9e_(mythologie)


    Cet article est une extension d'une chronique publiée dans BaroquiadeS: https://www.baroquiades.com/articles/chronic/1/medee-charpentier-niquet-tce-2023